LES ENJEUX

house

Photo de la Koshino's house, de Tadao Ando (*__*)


 

(Il est plus que temps d'aller emballer ton amoureux sur du Otis...)

Le post qui suit est vieux (il a plus de 3 ans), il est pile dans la réflexion que l'on mène (même si ce n'est pas un post dont je sois particulièrement fière, je me suis dit que ça serait pas mal de le relire... Ça fait feignasse hein? ).

Demain un autre billet de 2008 en relation aussi avec l'architecture et avec 
Ludwig Mies van der Rohe (et son fameux «Less is more»).

Allez bise. 

 Bon je suis définitivement rentrée et n'ai plus aucun prétexte pour ne pas poster... À ce propos, mon masochisme n'attend qu'une chose, que vous flagelliez ma paresse potentielle. Allez s'il vous plait... Faites moi mal encore... Et encore... Mon ami G., architecte a passé le week end, sur ma demande de sale petite curieuse, à me parler de constructions, déconstructions, reconstructions et autres redéconstructions.

 Plus il me parlait, plus je la ramenais, plus on s'interrogeait, plus on se rendait compte que l'architecture est très clairement, sous bien des aspects, la même chose que la mode. J'vous jure, ça en est troublant. Il ne s'agit que d'enveloppe. Il ne s'agit que du rapport à l'intime protégé, de deux manières différentes certes, mais la démarche est absolument la même (l'utilisation d'"absolument" n'est pas du tout inappropriée, ni exagérée, promis).


 À la construction d'un bâtiment, quel qu'il soit, l'architecte se pose en amont la question de la réalisation aboutie de 3 enjeux.

Les 3 enjeux architecturaux sont:


1) L'enjeu fonctionnel: vulgairement ça pourrait être l'aspect "pratique" du bâtiment (on parle toujours d'archi là). Pas qu'il soit habitable, non qu'il y soit agréable physiquement d'y vivre. Une bonne construction se devrait d'être apaisante. Et par extension apathique. Que ce bâtiment ne provoque aucune douleur, que les pièces ne soient pas trop éloignées, ça risquerait de faire mal aux jambes, que les systèmes de chauffage soient suffisants, ça risquerait de faire froid tout le long du corps sinon. Il ne s'agit pas que de pratique, mais bien de préservation de l'intégrité et du confort le plus grand possible. 

2) L'enjeu social: Se trouver une place dans la société. Ce qui est donné à voir de soi, à travers sa jolie maison ou son bel appartement donne les infos sur ce qu'on est et sur la caste à laquelle on appartient ou celle à laquelle on tend à appartenir. Le paraître en quelque somme. 

3) L'enjeu sensible:  "Sensible" au sens littéral, i.e. qui a rapport aux sens. Ce qui est agréable à l'œil (jolie vue, jolie lumière), à l'oreille (le silence, rien de toxique à l'ouïe), le toucher (bonnes textures, marbre agréable pour marcher, bois doux sous la main), l'odorat (maintenir une odeur agréable, chatouillant les narines d'effluves plaisantes) et le goût mais ça reste quand même rare de lécher goulument sa maison... Mais bon rien n'empêche d'avoir des murs en chocolat si on kiffe... Un bonne construction remplit ces 3 enjeux. Elle devient bonne si les 3 sont aboutis. Pas 2 en entier et pis presqu'un autre, non je dis bien les 3. C'est pas moi qui dit, c'est G. 

Revenons-en à nos jupes, décerébrées que nous sommes et que nous ne cherchons pas à nous recerébrer. Le vide c'est mieux, ça prend moins de place... 3 enjeux.

Mais est-ce différent en mode? Est-ce différent avec nos jeans, nos pulls, nos bandeaux, nos collants?

 Ça ne devrait pas je crois, sauf que la modasse, pétrie de contradictions, n'en a que faire... La maison nous vivons dedans, et les sapes??? Tout pareil, non? Alors pourquoi, en vrac:

 1) Les chaussures échasses gigantissimes, immarchables, et broyantes chaque orteil avec un soin presque sadique... C'est pas comme si on achetait jamais de chaussures qui n'ont strictement rien d'apathiques...

2) La jupe crayon, faite pour être portée bien haute, cisaillant chaque parcelle de la taille laissant une marque rouge et enflée au moment du coucher...

3) Les tops à matière synthétique qui n'ont d'agréable que le prix... non mais c'est vrai faut arrêter de déconner, c'est quand qu'une fringue pétrolée est toute douce à même la peau?? ben voilà!!

 4) la veste si étriquée qu'elle manque (mais elle y est presque) à chaque seconde de provoquer une embolie pulmonaire... Je sais c'est pas possible mais je me suis dit qu'il fallait frapper fort pour faire passer le message...

J'ai une théorie avec mes propres enjeux, moi. Tout de suite moins techniques les termes:

1) Enjeu t'as ni chaud ni froid, t'es juste bien mais attention, t'es pas cul nu... Mais t'es pas serrée sinon c'est nul, ça pique, ça fait mal et après tu deviens désagréable à force de remettre la culotte qui fait que se barrer au mauvais endroit...

2) Enjeu pour se faire pécho... Ben quoi! Ben si, nous ne sommes que des animaux qui ne cherchent qu'à se reproduire... Alors il faut se rendre aimable à l'œil...

3) Enjeu de caste. Pas forcément révélateur de la caste sociale à laquelle on appartient... l'important n'est pas d'être riche, mais de faire genre que oui... Subtil hein!!! Non pas tant, mais subtil est un mot que j'adore et que je n'utilise jamais, c'est chose faite... Il ne s'agissait pas d'approfondir les choses, juste de constater qu'on en oublie des trucs dés qu'il s'agit de s'habiller. C'est pas comme si on oubliait pas le b.a.ba... Ben si c'est comme si on l'oubliait justement!!!!! Fonctionnel bordel...

Commentaires

agatano a dit…
Intéressant ce vieux post ;-)
j'avais déjà pensé à ces différents "enjeux" de la mode, sans arriver à être aussi claire et structurée... On y est je crois!
Clara a dit…
cool ce post ! c'est tres joli le corps comme maison, je vais y repenser, ca m'acompagnera toute ma journee (et accessoirement ca me motivera pour aller a la piscine -___-)
Anonyme a dit…
Salut Marie, Depuis le retour des vacances j’ai très envie de laisser quelques lignes tellement les thèmes évoqués sont super passionnants, intéressants. Mais open space oblige, ça n’est pas possible ! Je me dépêche ! Concernant l’archi je me sens super concernée puisque depuis 7 ans maintenant je travaille dans une agence connue dans le milieu de l’architecture. Je travaillais avant dans la mode et le parallèle que tu fais, je l’ai fait aussi.
Récemment je me suis fait une autre réflexion, j’ai une amie styliste d’une grande marque qui me dit que l’objectif de la créatrice est d’accéder à un prêt à porter de luxe. Je trouve que la marque s’éloigne de plus en plus de son image de départ (qui avait un joli succès) et maintenant on sent un flottement et un positionnement entre 2 chaises. Et ma conclusion était que la mode regarde la mode et créait pour les gens qui font de la mode. Le tout est malaxé ensuite pour une diffusion grand public.
Et pour l’archi je pense que c’est pareil, il y a des catégories d’architectes qui construisent en suivant une ligne qui appartient à telle ou telle chapelle et qui fait l’admiration – ou pas- suivant là où l’on se situe. L’autre jour, avec mon fiancé architecte nous étions dans le quartier des Batignolles en plein bouleversement, de grands immeubles de logements sont en cours de construction. Les 2 pratiquement terminés sont affreux, avec des couleurs, des fioritures en façade pourquoi !? Mon fiancé dit que c’est ce qui plait à la Ville de Paris. Tu parles de T. Ando et de Mies dont les bâtiments sont des lignes pures et sobres, les français dans le domaine de l’habitat sont bien loin de tout ça. La sobriété fait-elle peur, voudrait-elle dire austérité ?
Bon voilà. Tiens une pensée de Lao Tseu, je crois, qui a dit la maison n’appartient pas à celui qui l’habite mais à celui qui la regarde. Bon séjour au Maroc.
Rose
Marie a dit…
Salut Marie,

TRès intéressant ce post encore une fois, et j'aime bien ce parallèle avec l'architecture...

Pour ma part, j'ai beaucoup aimé le passage sur les vetement qui piquent... grace au pétrole; surement parce qu'en deplacement hier, j'ai tué mon temps libre entre 2 rdv dans une galerie commerciale et fait toutes les boutiques: je suis ressortis sans rien et avec la désagréable impression d'avoir visité l'usine total... ces matieres synthetiques mon dieu mais je suis la seule à pas y arriver??

en tout cas c'est tjrs un vrai plaisir de te lire!
Bisous
Zimbie a dit…
ces enjeux sont très interessants

http://prendsmoipourunebille.wordpress.com/
sarah's a dit…
bonjour, bonjour!
eh bien voila, après une semaine de super post, là, il fallait vraiment commenter, celui-ci!

Je suis en master d'architecture et tu viens de me (re)sortir un post parfaitement comme j'avais besoin de lire, "l'architecture est très clairement, sous bien des aspects, la même chose que la mode".
Ne pas avoir connu ton blog plus tôt est trop bête! merci donc pour ce old-post!

Ça fait un an que je suis quelques "blogmode" et un jour de courte inquiétude quant à mon soudain attrait pour la fringue, mon copain, (aussi en archi), m'a rapidement donné des explications pas si éloignées des tiennes, celle de ton ami G et de l'architecte qui a laissé un commentaire plus haut (d'ailleurs son parcours professionnel et passage de la mode à l'archi m'a juste fait rêver!).
Donc ton post a tout simplement fini de me convaincre que je ne suis pas complétement perdue à profiter (bon ok, kiffer) de ces deux mondes qui pourraient paraitre éloignés. Depuis peu, je pense souvent à la façon dont je pourrait allier ces deux univers... peut-être une première réponse ici!

J'me permet de rajouter ici une (des) micro-pensée(s).
Pour "l'enjeu social", en archi, j'ai toujours pensé qu'il y avait la dimension "offrir" une enveloppe à quelqu'un. Pour les fringues, c'est un peu le même entrain.
Bon, ça rejoint peut-être l'idée de l'enjeu fonctionnel mais pour moi c'est différent parce que je dirais qu'un bâtiment (un vêtement), qui fonctionne, c'est dans sa première aspiration soit "couvrir", "abriter" mais aussi dans lorsque ses atmosphères et ambiances sont réussit.

Sinon, lors de ma lecture, la phrase "l'important n'est pas d'être riche, mais de faire genre que oui" m'a laissé pensive, voire complétement en désaccord... Dommage que tout tourne autour de la tune! Personnellement, je n'aspire pas, en me sapant, à paraitre plus riche...(ou alors j'ai mal saisi le sens de ta phrase, à voir).
J’espère que pour les vêtements, comme pour les maisons, la modestie (j’hésitai avec "simplicité" mais richesse n'empêche pas simplicité) fait aussi partie des choses que les autres perçoivent de nos (deux) enveloppes.
Hé! en écrivant cette phrase je me rappelle que ton intro parle de Mies... bordel, vivement demain!!! => blog parfait!


ps: j'ai jamais autant écrit dans un commentaire! Difficile de trouver les mots, je sais même pas si j'ai bien réussi à retranscrire mes idées... Mais je ne doute pas que tu aimes la lecture!

ah oui, et merci!!!!
Unknown a dit…
Je suis une lectrice plutôt récente et j'adore te lire ^^ t'as bien fait de nous resservir un vieux post bien pensé pour le plaisir de mes petites neurones restantes...
Si ça te branche ou tes lectrices, cette semaine des vernis à gagner sur mon blog ;) Bises,

http://melolimparfaite.blogspot.fr/
laïka a dit…
J’avais pas lu l’annonce en rose au début, je me disais bien qu’il y avait un brusque changement de style…

Sinon, ta théorie des enjeux colle bien la à théorie des 3 pulsions instinctives ; j’ai essayé de trouver des exemples se rapportant à la fringue pour chacun d’eux :

- conservation : maintien de l’intégrité physique et psychique
* des chaussures qui permettent de courir et de ne pas avoir les pieds qui se déforment
* un sac qui permet de mettre le fourbi qui pourrait être nécessaire (clés, argent, médicaments, affaires de rechange, nourriture et boisson…)
* des habits adaptés au climat, des superpositions adaptées aux changements de conditions dans une même journée
* des ceintures qui ne gênent pas la digestion et qui ne font pas mal
* l’apprentissage des techniques de fabrication pour pouvoir être autonome
* garder un tas de vêtements dans son armoire en cas de pénurie demain :-)
* importance de la sensation dans le vêtement : douceur, respiration, couvrance…

- social : s’adapter et se relier aux autres
* adaptation aux codes du milieu auquel on souhaite s’intégrer, à l'héritage culturel
* indiquer son statut à n’importe qui (style, habits de travail, indicateurs hiérarchiques…)
* de l’ampleur qui permet de se cacher, se fondre dans le milieu
* adopter une tendance qui nous touche et se sentir de connivence avec certaines personnes averties
* un sac qui permette de mettre du fourbi qui pourrait être utile au groupe (affaires pour les enfants, dépannage pour les collègues…)

- sexuel : volonté d’expansion de soi, partage de moments avec une personne bien précise
* fringues qui expriment notre singularité, notre sens du beau
* fringues qui mettent notre corps en valeur, qui donnent envie de le découvrir (ksss)
* conseils vestimentaires à une personne particulière


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