L'ENFANT QUE JE SUIS...

Enfant, j'avais bien conscience que c'était une des périodes les plus heureuses de ma vie. Tout était permis: failles, faiblesses, maladresses, mensonges, approximations de pensées... Et puis tout était possible: vouloir être astronaute, vétérinaire, mannequin, immortel (on met du temps à comprendre que nous aussi on ne sera pas toujours sur la Terre) même devenir celui qui changera le monde et qui guerira tous les maux humains...
Et puis on grandit, on oublie nos résolutions humanistes et on se met à accepter. Il y a un aspect mediocre dans le fait de vieillir. On tolère l'inacceptable pour les autres êtres humains et pour soi en se disant que ça pourrait être pire. L'enfant est plus exigeant avec la vie que l'est l'adulte. Il ne s'accomode pas du tiède. Adulte, on oublie aussi l'amour qu'on avait pour soi. L'enfant s'aime, d'ailleurs il ne se pose pas la question de l'orgueil mal placé. Les choses sont telles qu'elles sont et il en va de même pour lui...
Décevoir l'enfant que j'étais est une préoccupation centrale pour moi... Si je devais recroiser la petite fille que j'étais (ce qui est fort peu probable on est bien d'accord... Sauf dans RETOUR VERS LE FUTUR...), je me dis qu'elle pourrait être déçue de l'adulte qu'elle est devenue. Je ne suis ni pire ni meilleure que les autres mais les enfants n'aiment pas l'entre-deux. Et à 5 ans je n'aurai pas aimé mon entre-deux, neutre.
J'ai voulu être avocate, fée, médecin, actrice, chanteuse, guerrisseuse des esprits (ne me demandez pas ce que ça veut dire, j'en sais trop rien), vétérinaire, juge pour enfants, voyageuge, styliste, princesse, écrivain, basketteuse professionnelle, éleveuse de chiens... Mais je ne fais rien de tout ça... Je ne sais même pas ce qu'il va en devenir de moi!!!
Je voulais pour le monde que plus aucun enfant ne pleure, qu'il n'y ait plus de sida, que ma famille reste tout le temps en vie, que les gens ne meurent plus de faim, que les hommes politiques arrêtent avec cette histoire de guerre nucléaire toute pourrie, que tout le monde trouve sa voie... Comme ça, facilement...
Et je bataillais enfant trouvant insupportable le stoïcisme des grands qui s'en foutaient de tout. Qui n'arrivaient plus à s'émouvoir devant la détresse humaine et toléraient le pire pour eux-mêmes. "Ca non, je ne serai jamais comme ça... Les pauvres ces grands. Ils ne comprennent rien à la vie. Être humain c'est se rebeller. C'est court ce passage sur Terre, alors il ne sera pas question de brader mon existence à du fadadsse... Mieux vaut vivre les choses à fond. Ne pas compter et aider les autres, et s'aider soi aussi. Et vouloir le meilleur pour soi. Je ne veux pas arrêter de croire en moi, sinon, qui va bien pouvoir le faire!"
C'est globalement ce à quoi se résumait ma pensée sur ma vie de "grande"... Et quand je fais le bilan, elle est drôlement éloignée de ce que je voulais et rudement proche de ce que je méprisais... je suis borderline...

Ma résolution pour ce début d'Avril, c'est de retrouver le contact avec mon Moi originel. Celui qui me définit le mieux, sans me prendre au sérieux avec ces histoires de personalités mal placées qui finalement ne me résument pas...
Et c'est bizarre parce que même si, des fois, on a l'impression d'avoir perdu le contact avec la môme en nous, il suffit de se voir en vidéo ou de s'entendre rire, et là... Et ben on se rend compte que l'enfant espiègle que l'on était n'est pas si loin de l'adulte soumis que l'on est devenu... Il suffit de farfouiller et de le laisser exister encore un peu. Et de redevenir insoumis et ému par le monde...

Commentaires

Anonyme a dit…
Tu n'es pas la seule dans ce cas Marie

A bientôt,
Eric
Anonyme a dit…
Je me demande pourquoi ils disent que les enfants sont innocents.
Je me souviens lorsque j'avais six ans la vision d'une fourmi se débattant dans un verre d'eau me donnait fréquemment des érections.
J'ai pris des photos de cet hérisson écrasé sur le bord de la route.
Il est mort mais la vie grouille en lui.
Il est mort, pourtant le soleil tente de réchauffer son corps et les effluves qui en émanent sont les même que celles que l'on sent près de la tombe de mamie lorsqu'on vient en arracher les mauvaises herbes durant l'été.
Petit garçon, ce soir ta mère a mis ton assiette sur la table toute la famille n'attend plus que toi alors pourquoi ne réponds-tu pas lorsque l'on t'appelle?
Parce que tu es mort? D'accord.
Ceci explique mieux le fait que depuis six ans tu aies huit ans.
Dans ta chambre à présent de la poussière se répand sur tes jouets.
Seul pourra l'enlever le plumeau de l'oubli.
C'est vrai, la vie est injuste, elle quitte rapidement des petits corps.
En même temps, peut-être qu'elle ne se sentait pas à l'aise dedans.
Tu peux toujours chercher un sens, tu peux aussi asperger ton corps d'essence et permettre à un SDF de se réchauffer autrement qu'en avalant de l'alcool.
Rends-toi utile, la maîtresse te l'avait dit à l'école mais tu n'écoutais pas, absorbé par l'étude de ses protubérances mammaires,
tu rêvais d'y mettre ta tête, j'aurais fait pareil.

Où que j'aille, il me paraît entendre des éclats de rire d'enfants,
pourtant mes yeux ne voient rien que des feuilles tentant de se raccrocher à des feuilles en dessous desquelles des terrains de jeux demeurent désertiques.
Feraient-ils une partie de cache-cache avec la mort?
Perdu.Le vent souffle, les urnes tombent, les enfants volent.
Cela fait bien longtemps qu'ils ne vont plus à l'école.
Petite créature de l'éphémère vos vies furent tranchées nettes jadis, qu'importe la cause, une époque est à jamais figée.
Même abondantes, les larmes que versèrent vos mères hier ne purent éteindre les flammes qui rongèrent vos cercueils.
Vos âmes sont préservées, enfermées dans des boites alignées dans une allée sordide que l'on parcourt le dimanche à la recherche d'une réponse qui ne vient pas.
Il n'y a que le vent.
Le petit garçon que j'étais n'aime pas du tout ce qu'il est devenu et lorsque je regarde à l'intérieur de moi, je le vois assis sur mon intestin grêle avec un porte voix, s'évertuant à hurler toute sa rage enfantine.
Je lui réponds : tais-toi, qu'est ce que tu vas faire, toi et tes trente kilos, tu n'es rien, juste une ombre à coté de qui les autres enfants n'aiment pas venir s'asseoir à la cantine.
Et si tu retournais plutôt dans ta chambre écrire à ton amoureuse ? Moi je sais déjà qu'elle ne t'aime pas, toi tu ne l'apprendras que dans deux mois lorsqu'à la classe de neige c'est un autre à qui elle choisira d'offrir ses lèvres pour son premier baiser.
Ne sois pas triste, je crois que l'amertume n'est pas contre te faire la bise.
Le front appuyé contre un carreau, de ma bouche s'échappe un soupir qui peu à peu se transforme en brise.
Sous son effet s'abattent une à une des quilles de couleur chromée qui dans leur chute s'entrouvrent et libèrent de minuscules prisonniers.
Je suis toujours un petit peu triste lorsque souffle le vent.
Je sais qu'il disperse de la poussière d'enfants.

thespiritt@aol.com
Anonyme a dit…
Cet artice est superbe. Je suis encore un peu une enfant hein a 15 ans quoi x)

mais déjà plus toute a fait une gamine. Déjà on se dit qu'on mourra et on s'en fout déjà on se dit qu'on est GRANDE.

Tu parles. Et on ne s'aime pas. Je suis ado, surement pour sa que c'est pire que tout mais tu as trop raison. On se hait on se trouve des défauts partout et après on regrette. On regrette sa aussi c'est débile.

Bref. La photo aussi est belle. Bravo, j'aime ton blogg madmoizelle la chic fille

<3
Anonyme a dit…
Hello Marie et joyeuses Pâques!!!
Quand je pense à mon enfance et à la petite fille que j'etais, je n'ai aucun souvenir de moments de joie, c'est affreux quand j'écris cela, ma gorge se serre... j'ai eu une enfance tres en marge (du fait 1/ de ma mediumnité qui s'est révelée dès l'âge de 3 ans et qui a bouleversé ma vie d'enfant, car je ne savais pas ce que c'etait...
2/par des parents tres secrets, austères, fermés et un peu tristes
3/si on te dit ferme les yeux et penses à un moment heureux de ton enfance, dis Marie tu vois quoi? surement quelquechose, et bien moi RIEN...
Je crois que j'etais ravie de grandir, car la petite fille que j'etais n'etait pas heureuse dans son statut d'enfant .
Marion a dit…
Très joli article,j'en ai les larmes aux yeux.
Moi,c'est comme Yow,j'ai 17 ans et c'est vrai que c'est pas un âge facile.On se cherche,on hésite,on ne s'aime pas vraiment...
J'ai parfois envie de redevenir une enfant là où tout paraissait tellement plus simple.
Isis a dit…
Je trouve ton texte très émouvant....à ton image.... bravo de ta cop isis valerie
Marie a dit…
Eric Maillard: Sûrement... Il y a un truc d'un peu universel là-dedans...

Spi: Ton texte est très joli...

Yow: Merci beaucoup... Jeune adolescente qui en a déjà vachement compris des trucs...

Wentworthlady: Oui joyeuses pâques à toi aussi...
Tu es en train de me dire que tu as des "dons". Si c'est le cas, ça a dû rendre plus compliqué ton rapport à l'enfance c'est sûr... Ne pas avoir une enfance très heureuse n'est pas synonyme d'une vie malheureuse... Heureusement... J'ai eu une enfance plutôt heureuse, c'était pas la joie tout le temps au taquet, mais j'y étais bien... Mais pour tout dire, pour rien au monde je n'aurais envie d'y retourner... je préfère maintenant!

Jeunedemoiselle: Merci, ça me touche vachement...
Tu verras, dans quelques années tu adoreras vieillir. Pour une fille, le pire, c'est d'être ado... C'est le pire moment, tous les inconvénients de l'enfance et tous les inconvénients de l'âge adulte. Super!!!

Isis: merci beaucoup ma belle!
Anonyme a dit…
ton texte est vraiment touchant, il m'a beaucoup emu et m'a fait revenir sur ma propre enfance, enfin sur ce qu'elle a pu etre,une enfant-adulte par moment avec des responsabilites qui ne devaient pas etre miennes.....voila pourquoi aujourd'hui je suis une adulte-enfant,adulte par rapport au travail,au differentes taches quotidiennes mais toujours un peu enfant,ado en apparence et pas tout a fait "grande" dans ma tete mais j'ai appris il y a peu que le mot femme qui me faisait si peur n'est en fait pas si terrible et que finalement ca pouvait etre pas mal non plus.Tout ca pour dire(j'en ai plein a dire), ton article est beau,bravo continu.

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